vendredi 8 juillet 2016

M. Sakiyama

M. Sakiyama nous prenait en stop cet après-midi avec Julien, en direction de Kabira. Comme c'est souvent le cas, il annonce d'abord qu'il ne va pas aussi loin, puis la conversation s'anime, il passe un coup de fil pour décaler un rendez-vous, puis déclare que finalement il concède à nous emmener à destination. M. Sakiyama est empathique de notre situation, quand il nous a vu au bord de la route, le pouce levé, il s'est dit : "Deux jeunes; ils n'ont pas d'argents; je vais les aider!" Nous lui assuront en retour notre gratitude.

Pour un retraité de 73 ans, le nombre de ses activités est impressionnant:

"Tiens, attrape un des sacs du panier dans le coffre, lance-t-il à Julien, assis sur la banquette arrière, Regardez, je pars découper ça le matin entre 6 heures et 9 heures, c'est de l'adan, une plante comestible locale, que je conditionne et vend aux izakayas."


Il arrête sa voiture sur le bas-côté et pointe un arbre à longues branches pointues et édentées similaires à celles de l'aloe vera, et aux fruits ressemblant a des ananas.


"- Je peux me faire 20,000 à 50,000 yens par matinée de récolte avec ça! Sinon vous venez de quel pays?
- De France.
- Ah, j'ai jamais été. Mais ma femme est Espagnole. Enfin, son père est Espagnol; Et sa mère est Philippine. Elle bosse à Tokyo, pour une école de langues que j'ai monté. Moi aussi j'y suis la plupart du temps, mais je suis rentré pour accueillir six personnes des Phillippines qui habitent chez moi, et à qui je trouve du boulot.
- Waouh, ça doit être sympa l'ambiance chez vous! Ils parlent japonais? Ils font quoi comme taf?
- Tu sais, il y a toujours beaucoup de boulot sur une île comme celle-ci. En général, les femmes font des ménages dans les hôtels. Et les hommes travaillent dans les champs, où c'est plus physique.
- Mais les Philippins peuvent bosser sans visa ici?
- C'est-à-dire qu'avant, ils ne venaient que pour trois mois. Mais j'ai monté une agence de recrutement à Manille, une structure qui permet de leur délivrer des permis de travail d'un an.
- Génial. Je suppose qu'un salaire au Japon est plus intéressant pour eux que de travailler au pays. Ils doivent même pouvoir envoyer de l'argent à leurs familles.
- C'est l'idée en effet. En plus je leur paye les billets d'avion. Tu sais, j'arrive à avoir des revenus comfortables, mais j'en redistribue une bonne partie de cette façon, en aidant ceux qui galèrent.
- Voilà une mentalité admirable, malheuresement trop rare ici.
- Tu as raison. De plus, les Japonais ont une facheuse tendance à se méfier des Etrangers. Pour moi, nous sommes tous des Humains avant tout.
- Oui, j'ai remarqué... La seule utilisation de ces catégories - "Japonais"/"Etranger" - de façon quotidienne me dérange pronfondément.
- Je te comprends tout à fait. Voilà, à mon sens, un vrai problème de société.
- Merci beaucoup de partager ce sentiment."

De plus, M. Sakiyama se rend parfois en Indonésie, d'où il a importé à Ishigaki une variété de mini noix de coco, non pas par la taille du fruit, mais de l'arbre, qui ne pousse pas à plus de deux mètres de hauteur, ce qui rend la cueillette bien plus aisée que les cocotiers traditionnels.